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Gretel et Hertha, 1939


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Gretel et Hertha ne sont ni sœurs ni cousines ! Aucun lien de sang ne les lie. En revanche, une religion commune à leurs deux familles les unit. Personne ne peut arrêter la montée du Nazisme en Allemagne, et voilà quelques années qu’Adolph Hitler a pris le pouvoir. La haine sévit dans tout le pays, le racisme grandit et l’antisémitisme va crescendo. Les foules scandent le nom du Reich. Elles se réunissent pour la gloire de l’Allemagne. Les familles de Gretel et Hertha ont dû se soumettre à des lois injustes et arbitraires dans les quartiers de Berlin. Et ces lois, elles les entendaient à tous les coins de rue. C’était « Nein » et « Forbidden » ! Tout est non et interdit !  Alors, la fuite était nécessaire. Une question de survie. Les familles ont vendu leurs bijoux pour payer des passeurs. Elles ont cédé leurs meubles, leurs bibelots et leurs tapis pour soudoyer les agents ! Plus rien qui ne puisse tenir dans une valise. Le passé bradé, laissé aux mains des opportunistes. Ne pas regarder en arrière, et entrer à bord du Saint Louis. Malheureusement, elles ont été refusées à Cuba et à Miami aux États-Unis. « Vous n’avez pas le droit d’entrer ici ! » leur a-t-on dit. « Allez trouver refuge ailleurs ! » les a-t-on informées. Les 963 juifs du transatlantique sont déboutés. Pourtant, c’est exactement ce dont elles ont besoin, c’est leur volonté la plus forte, de trouver un foyer ! Quelque part sous un olivier, sur une colline, derrière un mur ! Mais juste un foyer ! Gretel a un rêve. Elle veut vivre dans une jolie maison. Pas dans un quartier retranché de Berlin où les Nazis lui imposent des atrocités et lui lancent des méchancetés. Où elle est fichée, incarnant la religion ennemie. Où elle n’a plus la liberté d’être une fillette insouciante, libre, comme les autres. Une enfant anonyme qu’on laisse tranquille. Elle ne veut plus jamais retourner en Allemagne. Pour Gretel, l’Allemagne, c’est terminé ! Elle en est convaincue. Le démon en Allemagne est vivant et ne cesse d’agir. Hertha, c’est une autre histoire. Elle ne rêve pas les yeux ouverts, mais elle fait des rêves quand elle dort. La voilà qui raconte à Gretel : « J’ai vu une mer, une très grande mer s’ouvrir à nous ! Rien qu’à nous ! La mer s’est ouverte grande, des chevaux sont tombés. J’ai vu aussi des sauterelles courir dans les champs ! J’ai vu tout ça ! Je suis sûr de ce que je dis ! L’armée a été évincée ! La mer s’est ouverte rien que pour toi et moi ! Comme si le Très-Haut existait ! » Gretel reste stupéfaite devant ce rêve. Elle esquisse un sourire à Hertha qui la serre fort dans ses bras. Les deux filles restent postées devant le hublot du transatlantique qui les emmène finalement en Belgique, au port flamand de Anvers. Ce sont des cheminées, des immeubles anciens ! Elles ne sont pas à New York ! Mais c’est une vie nouvelle qui les attend…

 

Le paquebot Saint Louis amarre enfin à Anvers. Les familles s’agitent. Un brouhaha s’élève dans le paquebot. Les familles prennent tous ce qu’elles ont emportés avec elle lorsqu’elles ont quitté l’Allemagne. Les familles emportent un livre religieux, des photos, un sac d’habits et le strict nécessaire sur les quais. Au moins, ici, elles sont loin d’Adolph Hitler. Elles sont protégées de la haine. Elles sont loin des masses populaires qui hurlent le nom du Troisième Reich. Gretel est convaincue que personne ne pourra les toucher en Belgique. C’est son nouveau foyer.  Gretel tient la main de Hertha. Elles marchent tranquillement sur les quais. Il leur faut trouver un refuge. Un foyer où dormir, où se raconter des histoires ! « Je ne sais pas si le Très-Haut existe ! » répond Gretel sur un ton de tristesse. Les agents des quais sifflent. Les familles sont redirigées dans la bonne direction à Anvers. Elles sortent des quais et errent dans la rue. Et maintenant, où aller ?

 

Alan Alfredo Geday

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